Les modifications aux délais de procédure civile apportées par l’arrêté royal  n°2 du 9 avril 2020 : quel impact pour votre dossier ?

Les modifications aux délais de procédure civile apportées par l’arrêté royal n°2 du 9 avril 2020 : quel impact pour votre dossier ?

 

Les modifications aux délais de procédure civile apportées par l’arrêté royal  n°2 du 9 avril 2020 : quel impact pour votre dossier ?

 

Voilà plusieurs jours que notre gouvernement et notre Ministre de la Justice, avaient annoncé que des mesures spéciales seraient prises, pour permettre le report de certains délais, dans le cadre des procédures en cours ou à introduire, en raison des circonstances liées à la crise du Covid 19.

Ces mesures sont à présent connues puisque 3 arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux ont été publiés dans la seconde publication du Moniteur Belge de ce jeudi 9 avril 2020.

Nous n’aborderons ici que l’arrêté royal n°2, relatif aux procédures civiles.

Quel est l’objectif de cet arrêté royal n°2?

Le législateur a précisé qu’il s’agissait « vu l’extrême urgence, de répondre aussi vite que possible aux difficultés de la vie publique, économique, judiciaire et administrative, suite aux mesures prises en vue de lutter contre la propagation du virus Covid 19 ».

Il invoque également « le risque devenu réel que des actes de procédure requis devant des organes juridictionnels ne puissent pas être accomplis dans les délais » et la nécessité d’« éviter des effets juridiques préjudiciables durant toute cette période » pour en conclure qu’il faut proroger les délais de procédure.

A quelles procédures s’applique-t-il ?

A toutes les procédures civiles devant les courts et tribunaux, à l’exception des procédures pénales, sauf si elles n’ont trait qu’aux intérêts civils.

Quelle est la période visée ?

L’arrêté royal n°2 est entré en vigueur le jour de sa publication au M.B., soit ce 9 avril 2020.

Deux périodes sont visées :

-          Les procédures et recours qui devaient être introduits ainsi que les délais de conclusions qui tombaient entre le 9 avril 2020 et le 3 mai 2020 ;

-          Les audiences fixées entre le 11 avril 2020 et le 3 juin 2020.

Le gouvernement retient comme date actuelle de fin du confinement le 3 mai 2020, mais il est précisé que cette date pourrait être prolongée.

Que prévoit cet arrêté royal ?

ð  Une prorogation des délais de procédure pour introduire une demande en justice ou pour exercer une voie de recours.

ð  Une prolongation des délais de conclusions.

ð  Le recours généralisé, pour toutes les affaires pour lesquelles une audience est fixée dans la période concernée, à la procédure écrite.

 

A.      Les délais pour introduire une procédure ou exercer une voie de recours :

 

L’article 1er § 1er prévoit que les délais de prescription et les autres délais pour introduire une demande en justice, qui expirent entre le 9 avril 2020 et le 3 mai 2020  inclus (pour l’instant), seront prolongés de plein droit d’un mois après cette date, soit jusqu’au 3 juin 2020 (pour l’instant).

Ex : cela signifie que pour les demandes qui devaient être introduites, sous peine d’êtres prescrites, durant cette période (9 avril 2020 au 3 mai 2020 inclus), le délai de prescription est de plein droit, prolongé jusqu’au 3 juin 2020.

L’article 1er § 2 prévoit également que les délais pour exercer une voie de recours, qui expirent au cours de la période concernée (9 avril 2020 au 3 mai 2020 inclus) sont prolongés de plein droit d’une durée d’un mois après l’issue du confinement, soit actuellement jusqu’au 3 juin 2020.

Ex : cela signifie que si un appel devait être introduit au plus tard le 20 avril 2020, l’échéance est reportée de plein droit au 3 juin 2020.

B.      Les calendriers de conclusions :

Pour les procédures en cours, dans lesquelles des délais de conclusions avaient été fixés, qui viennent à échéance entre le 9 avril 2020 et le 3 mai 2020, ceux-ci sont prolongés de plein droit jusqu’au 3 juin 2020.

Les délais de conclusions suivants sont également reportés.

Ex : si un délai de conclusions expire le 25 avril 2020, il est de plein droit prolongé jusqu’au 3 juin 2020. Le délai suivant sera fixé 1 mois après cette date, soit au 3 juillet 2020.

Cet aménagement des calendriers de procédure risque également de reporter des audiences. Il est ainsi prévu que si le nouvel aménagement du calendrier de procédure a pour conséquence que le dernier délai expire moins d’un mois avant la date fixée pour l’audience de plaidoiries, alors cette audience est remise de plein droit « à la première audience disponible un mois après l’expiration du dernier délai » (sauf exception – voir ci-dessous).

ð  Exemple concret des conséquences de l’arrêté royal n° 2 sur un calendrier de procédure :

Calendrier initial :

-          conclusions défendeur : 25 avril 2020

-          conclusions demandeur : 25 mai 2020

-          conclusions synthèse défendeur : 25 juin 2020

-          audience de plaidoiries : 20 septembre 2020

Nouvel aménagement du calendrier « de plein droit » sur base de l’arrêté :

-          conclusions défendeur : 3 juin 2020

-          conclusions demandeur : 3 juillet 2020

-          conclusions synthèse défendeur : 3 août 2020

-          pas de report de l’audience du 20 septembre 2020 (fixée plus d’un mois après le dernier délai).

Si l’audience avait été fixée le 10 aout 2020, elle serait remise de plein droit à la première date utile après le 3 septembre 2020.

 

Exception : urgence motivée.

L’article 1er §3 prévoit que si « la poursuite de la procédure est urgente » et qu’une partie estime « qu’il y a péril dans le retard », elle peut, « sur demande motivée », écrite ou orale, demander à ce que la prolongation des délais de procédure ne s’applique pas. Le juge peut (mais ne doit pas) accéder à cette demande.

Sa décision sur ce point est sans recours.

 

C.      Les audiences fixées entre le 11 avril 2020 et le 3 juin 2020 : prise en délibéré selon la procédure écrite, sauf exception :

 

Le principe : il est prévu que toutes les affaires qui devaient être plaidées entre le 11 avril 2020 et le 3 juin 2020 inclus sont « de plein droit prises en délibéré sur la base des conclusions et pièces communiquées, sans plaidoiries ». 

Il s’agit donc d’une application généralisée et automatique (sauf exception) de la procédure écrite visée à l’article 755 du code judiciaire.

L’exception : la partie qui ne peut accepter le recours automatique à la procédure écrite, fait une demande écrite et motivée au juge au plus tard une semaine avant l’audience ou pour les audiences de plaidoiries qui sont fixées dans les 8 jours de la publication de l’arrêté (entre le 10 et le 18 avril 2020), au plus tard, la veille de l’audience.

L’arrêté organise également le dépôt des dossiers de pièces.

Le juge a également la possibilité, un mois après la prise en délibéré de l’affaire (ou un mois après le dépôt de pièces), de demander des explications orales aux parties, éventuellement par vidéo conférence, sur « les points qu’il indique ».

Il est également prévu que le recours à la procédure écrite se fait sans préjudice de l’article 1004/1 du code judiciaire qui organise l’audition des enfants mineurs dans les procédures familiales qui les concernent (hébergement, …).

 

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Vous aurez compris que ces dispositions ont un impact important sur toutes les procédures en cours, mais également sur les procédures et recours à introduire.

N’hésitez pas à prendre contact avec Alterys, pour comprendre ce que cela signifie concrètement pour votre dossier et pour déterminer si des demandes particulières doivent être faites, en raison notamment d’une urgence particulière de votre dossier.

Alterys est accessible du lundi au vendredi entre 9H00 et 18H00 par téléphone 02/541.18.50 ou tous les jours par email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

Et surtout, continuez à prendre soin de vous.

 

Emilie Cappon

Avocate associée et médiatrice agréée.


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